Miser sur la fonctionnalité | L’inspirant parcours d’Electro Calorique

Miser sur la fonctionnalité | L’inspirant parcours d’Electro Calorique
Electro Calorique, entreprise fondée en 1919, est spécialisée dans la conception, la fabrication et la maintenance de chariots qui permettent de maintenir les repas au froid et de les réchauffer pour ensuite les distribuer en milieux hospitaliers et carcéraux. L’entreprise centenaire va très bien, alors qu’elle emploie 180 salariés dans cinq pays, dont la France, le Canada, l’Espagne, le Portugal et l’Allemagne. Depuis peu, elle s’est lancée sur la voie de l’économie de fonctionnalité et de la coopération (EFC).

Depuis cette année, Electro Calorique propose une alternative à la vente de son chariot avec une gamme mise à disposition chez les clients, qui seront facturés à l’usage du chariot et du logiciel permettant son traçage, tous les mois. «On a développé un système spécial de détection de chauffe, qui permet de facturer au plateau-repas lorsqu’il est remis en température», explique Jérôme Brossat, président de l’entreprise.

Cette nouvelle offre est gérée grâce à une plateforme informatique, également mise sur pied par Electro Calorique, permettant au client et à l’entreprise d’avoir accès à tout un tas de données transmises par un système de cartes de téléphones. Il est ainsi possible de visualiser le parc de chariots disponibles, le nombre de plateaux remis en température, la consommation électrique, la situation géographique des produits, le nombre de kilomètres parcourus.

Avec l’EFC, la performance économique est basée sur la durée de vie du produit: il doit être fiable, de bonne qualité, ne doit pas tomber en panne. Ça a aussi eu un impact sur la qualité de fabrication et le choix des matériaux.

-Jérôme Brossat

Des bénéfices multiples

Basée sur l’usage, cette transformation du modèle d’affaires d’Electro Calorique s’inscrit dans l’économie de fonctionnalité et de la coopération (EFC), l’une des douze stratégies de circularité. «Ça permet de renouveler le matériel sans puiser dans les budgets d’investissement des hôpitaux, indique le président. La facturation est liée à l’activité de l’hôpital, ça correspond à son niveau de chiffre d’affaires.» Désormais, les établissements peuvent commander leurs chariots en fonction du taux d’occupation des lits, par exemple.

 

EN SAVOIR PLUS SUR L'EFC

 

Grâce à cette approche, Electro Calorique a pu réduire son impact environnemental. «Avec l’EFC, la performance économique est basée sur la durée de vie du produit: il doit être fiable, de bonne qualité, ne doit pas tomber en panne, précise Jérôme Brossat. Ça a aussi eu un impact sur la qualité de fabrication et le choix des matériaux.» Les achats ont ainsi été recentré autour des usines et l’isolement des chariots a été revu afin de rendre leur recyclage plus aisé.

Pérenniser l’entreprise

Quelques années la crise de COVD-19, son président Jérôme Brossat s’est questionné sur la manière de développer et pérenniser l’entreprise. Comment rester compétitif en continuant d’innover et de fournir le meilleur aux clients? «Je voulais avoir une vision à plus long terme dans un marché devenu très concurrentiel, avec d’un côté les investisseurs qui cherchent un retour, et de l’autre, des clients friands d’innovation, raconte-t-il. J’ai essayé de regarder ce qui se faisait ailleurs dans le monde en termes de modèles économiques, autre que la vente.»

Au cours de ses recherches, l’exemple des photocopieuses le marque. En France, l’on paie à la feuille imprimée, avec une facture à la fin du mois en fonction de l’usage. «Ça casse la notion de prix, c’est adapté aux besoins des clients et ça évite un investissement important dans le produit qu’est la photocopieuse», souligne-t-il. Sans savoir que ce modèle s’inscrivait dans l’EFC, il comprend que c’est exactement ce qui convient à son entreprise. Mais avant de se lancer vers ce nouveau modèle, il a d’abord réfléchi plus globalement au cycle de vie de son produit.

Pour réussir cette transformation, Electro Calorique ne s'est pas lancée seule dans l'aventure. Elle a bénéficié du soutien du Centre International de Ressources et d'Innovation pour le Développement Durable (CIRIDD), qui anime le réseau ECLAIRA (Economie Circulaire en Auvergne-Rhône-Alpes). Le CIRIDD a aidé l'entreprise à définir sa stratégie, à identifier ses partenaires, à concevoir son offre et à communiquer sur sa valeur ajoutée. 

Jérôme Brossat d’Electro Calorique en conférence au Québec dans le cadre de la journée de regards croisés France  - Québec au sujet de l'EFC, organisé par le CERIEC et le CIRIDD, (novembre 2022).

Une démarche socio-environnementale

Jérôme Brossat et son équipe ont travaillé sur une première problématique, la perte totale de vue de son produit, une fois livré au client. «On a créé un atelier de recyclage des chariots dans une de nos usines, pour garder la main sur la fin de vie, les récupérer à la fin pour en faire des pièces détachées et reconstruire des chariots, affirme-t-il. On a appelé l’atelier Seconde vie et on s’est associé à une entreprise adaptée qui favorise l’insertion des personnes en situation de handicap.» Dès lors, Electro Calorique forme six personnes en situation de handicap qui s’occupent du traitement et du recyclage des chariots.

Cette première étape vers la circularité a amené l’entreprise à transformer progressivement son modèle d’affaires classique. «Si l’on voulait continuer à se bagarrer avec nos armes de fabricants français dans un monde qui bouge, avec le risque de voir des entreprises concurrentes arriver sur nos marchés, il fallait imaginer autre chose, témoigne Jérôme Brossat. Plus on innove, plus le produit coûte cher, et moins les clients peuvent se permettre de l’acheter. Ça qui nous a poussé à réfléchir autrement.» 

Conseil aux entreprises

«Il est très important d’être accompagné par une structure comme le CIRIDD, sans cela, je ne pense pas qu’on aurait eu ces réflexions, témoigne Jérôme Brossat. C’est même un facteur clé de succès.» L’entrepreneur a apprécié les échanges avec d’autres entreprises, qui ont fait germer de multiples idées. « Je porte le projet depuis 10 ans, je savais que l’économie circulaire et l’EFC étaient l’avenir de mon entreprise, raconte-t-il. Mais, grâce à l’accompagnement dont on a bénéficié, on est allé plus loin avec la fin de vie, l’impact social et environnemental.»

Jérôme Brossat est également fier d’avoir pu démontrer que les personnes en situation de handicap pouvaient travailler. «Cette démarche a mis en valeur tout ce qu’on faisait, soit le fait de fabriquer en France, puisque nos usines sont dans de toutes petites provinces, et on est aussi le plus gros employeur de la ville, en général», ajoute-t-il.

L’EFC permet de rentrer sur de nouveaux terrains de jeu. «Je vois beaucoup d’intérêt au niveau du changement de culture d’entreprise, c’est très apprécié des clients aussi, car ça correspond vraiment à la nouvelle façon de travailler», dit-il. Pour le président d’Electro Calorique, il faut que les entreprises qui hésitent à se lancer sur la voie de l’EFC sachent que la transformation est accessible, possible et même souhaitable.

La collaboration entre le CERIEC et le CIRIDD au service de l'EFC est soutenue par le ministère des Relations internationales et de la Francophonie du Québec et le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères de la République française, dans le cadre de la Commission permanente de coopération franco-québécoise.

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Auteur de la page

Pascaline David

Modérateur

Emilie Chiasson

Conseillère en communication - Économie circulaire